Depuis 2016, Dassault Systèmes dirige un programme appelé Design for Life, axé sur les pratiques et processus innovants pour la durabilité dès la conception. En 2020, Dassault Systèmes a recueilli de puissants témoignages de designers et d’architectes tournés vers l’avenir dont le travail se situe au carrefour de la technologie, de la science et de la nature – pour un impact radicalement positif sur le monde d’aujourd’hui. Cette initiative a été menée en collaboration avec Dezeen, l’influent magazine de design et d’architecture.
Simuler dans l’inconnu pour appréhender les possibles
“Les designers utilisent la technologie comme un catalyseur de réflexion, notamment dans une relation renouvelée avec la nature, nos conditions de vie et nos environnements. Il s’agit de questionner les modalités de métamorphose du monde. Les technologies numériques, comme la simulation, sont plus généralement utilisées par les ingénieurs afin de comprendre et de réduire les risques inhérents aux projets industriels – gestion du poids, impact logistique (maîtriser ce qui pourrait être) – alors que, pour le designer, il s’agit de simuler dans l’inconnu avec des scenarii créatifs, d’appréhender les possibles comme capacité d’imagination pour réfléchir et juger la pertinence de leur travail.
La technologie introduit de l’objectivité dans le projet de design. Et si elle n’est pas convoquée pour la recherche de performance ou d’optimisation, elle permet une perspective systémique, au caractère durable, comme mesure de l’impact du geste “design”. Les technologies deviennent la nouvelle matière première des designers et proposent à ce titre de nouveaux critères de jugement, au côté de la subjectivité et de l’intuition. La critique du design dans sa dimension industrielle comme accélérateur du consumérisme trouve dans les apports de projection et de représentation que proposent les technologies du numérique un moyen de révéler les fins véritables de sa démarche : le design pour le bien-être des gens.
Le monde du design élabore ses projets en mode “recherche-action” au cœur de communautés vibrantes et connectées. Les espaces virtuels de cocréation, comme ceux de la plateforme 3DEXPERIENCE, offrent l‘opportunité aux designers de réinventer leur pratique et d’apprendre en faisant. L’initiative Design for Life incarne la possibilité de représenter l’imaginaire en tant qu'éléments tangibles et concrétisables, d’être inspiré par la structure du vivant. L’imagination s’y trouve transformée en représentation du monde“
ANNE ASENSIO, VICE-PRÉSIDENTE DESIGN EXPERIENCE, DASSAULT SYSTÈMES
Favoriser un design durable basé sur des processus naturel
Arthur Mamou-Mani s’intéresse à l’architecture conçue et fabriquée numériquement. Son cabinet croit en l’innovation, l’artisanat et dans le rôle de l’architecture au sein de la société. Dans ses bureaux londoniens, il crée un design durable basé sur des processus naturels et réalise ses projets dans un fab lab intégré. Cette boucle empirique permet d’itérer, d‘échouer et d‘apprendre sans cesse. Une installation va illustrer les convictions de l’agence en matière d’économie circulaire.
Conçue avec la solution XGen permettant la création de modèles paramétriques au sein de la plateforme 3DEXPERIENCE, l’installation est constituée d’une grille dynamique de modules imprimés en 3D évoluant à travers l’espace comme si elle était emportée par le vent. Des modules en acide polylactique (PLA) sont imprimés en 3D sur place. Le PLA est un plastique biosourcé à base de sucre fermenté, se présentant sous forme de granulés.
Sur place, un broyeur montre comment le recyclage est effectué à une échelle très fine. Le broyeur transforme une pièce déjà imprimée en granulés qui peuvent servir immédiatement à une nouvelle impression. Arthur Mamou-Mani l’affirme : “Il est très important que les concepteurs commencent à penser au-delà de leur projet, ils doivent réfléchir à l’origine du matériau, à sa destination, à la manière de le reconfigurer, tout le cycle de vie du projet doit être pris en compte”
ARTHUR MAMOU-MANI, ARCHITECTE
S’inspirer d’une aile de papillon pour créer un textile
Le travail de Julia Koerner, designer installée entre Salzbourg et Los Angeles, brouille les frontières entre l’architecture, la mode et la conception de produits. Elle utilise largement l’impression 3D, et dessine en s’inspirant de formes naturelles. Son projet le plus récent a été le design de majestueux vêtements pour le film Black Panther, réalisé par Ryan Coogler pour la franchise Marvel, elle s’est notamment inspirée de formes naturelles.
Explorant les possibilités du biomimétisme, sa création repose, par exemple, sur des photographies macro d’ailes de papillon, numérisées et retraitées par un algorithme pour être traduites en modèles 3D. Après avoir traité les photographies en milliers de pixels cartographiant les ailes et les couleurs du papillon, le motif est reproduit en brins imprimés en 3D sur du tissu flexible, mouvant comme une forme biologique, qui exprime un flux organique prenant vie à chaque mouvement.
Julia Koerner, designer
Explorer la richesse infinie du biomimétisme
Michael Pawlyn est un architecte britannique reconnu pour l’importance qu’il accorde au biomimétisme et à l’innovation inspirée par la nature. Son agence, Exploration Architecture, utilise cette approche pour repenser la construction et développer des solutions utilisant les ressources de manière beaucoup plus durable.
“Des structures biologiques complexes, comme une coquille, sont d’une efficacité incroyable, et avec la conception informatique et l’impression 3D, il devient plus facile d’imiter cette complexité et cette efficacité”, explique-t-il. En modélisant un crâne d’oiseau et en agrandissant sa structure pour l’imprimer en 3D, Michael Pawlyn crée par exemple un pavillon économe en matière, robuste et incroyablement léger. Comme dans les coquilles et les feuilles, des surfaces très minces sont transformées en structures solides par pliage ou incurvation.
Mutualiser la science, l’art et la conception informatique favorise le rapprochement avec des fonctionnements biologiques pour créer une architecture économe en matériaux et n’émettant aucune pollution
MICHAEL PAWLYN, ARCHITECTE
Ressusciter un mythe avec la DS Aero Sport Lounge
À propos de la DS, voiture mythique créée en France en 1955, Roland Barthes écrivait dans ses Mythologiesque “l’automobile est aujourd’hui l’équivalent assez exact des grandes cathédrales gothiques : je veux dire une grande création d’époque, conçue passionnément par des artistes inconnus, consommée dans son image, sinon dans son usage, par un peuple entier qui s’approprie en elle un objet parfaitement magique.” En 2009, le groupe PSA remet en avant la marque DS, symbole de l’élégance à la française alliée à des avancées technologiques concentrées dans une ligne d’une grande modernité.
Thierry Métroz, directeur du design de DS Automobiles, explique que le concept car DS Aero Sport Lounge reprend les marqueurs initiaux de tradition et d’esprit d’avant-garde de la DS originale en multipliant les innovations techniques, sur le véhicule mais aussi concernant sa création. “80 % de notre processus de conception est numérique”, explique-t-il. L’équipe de designers utilise la modélisation paramétrique pour créer la forme initiale de la voiture offrant notamment une moindre résistance au vent. Le design est ensuite affiné en réalité virtuelle immersive.
THIERRY MÉTROZ, DIRECTEUR DU DESIGN DE DS AUTOMOBILES
Créer des possibilités d’échange et d’interaction
Designer, ingénieur et artiste plasticienne, Nassia Inglessis est fondatrice d’un studio de design expérimental : Studio INI est basé à Londres et à Athènes, et crée des environnements expérientiels immersifs. Urban Imprint est un moyen de réinventer un paysage urbain : l’environnement malléable et flexible se construit autour de ses habitants, l’empreinte du pied au sol se reflétant par une déformation équivalente du plafond.
Disobedience est un mur cinétique de 17 mètres qu’il est possible de traverser, son revêtement dynamique se déformant et s’ouvrant lorsqu’un visiteur y pénètre. Un câble d’acier se plie sous ses pas, et le revêtement fait de plastique recyclé se déforme. Ses moyens et processus de conception permettent au Studio INI de passer très rapidement du numérique au physique, en testant des conceptions complexes. “Nous avons toujours une main sur l’ordinateur et une main sur le matériau”, résume Nassia Inglessis
NASSIA INGLESSIS DESIGNER, DESIGNER, INGÉNIEUR ET ARTISTE